Syracuse

Avis des lecteurs

• l'Offrande Grecque 3/5

  Quelle aubaine ! un second ouvrage des aventures de Bernie Gunther, l’offrande Grecque, publié après le décès de l’auteur, Philip Kerr, et juste avant Metropolis. Pourtant, disons-le tout de suite, j’ai été passablement gêné par sa lecture et je dirai plus loin pourquoi. Comme à l’accoutumé, Bernie évolue parmi des personnages ayant effectivement existé et parfois de notoriété historique. Il prend part à des évènement eux aussi historiques, comme par exemple le massacre de Katyn, mais aussi bien d’autres évènements moins connus. Après Berlin avant et après la guerre, la France, Prague, Zagreb, Vienne, l’Argentine et d’autres lieux, Bernie découvre la Grèce en 1957. Il approche donc de la soixantaine. L’événement qu’il nous fait découvrir et qui n’est pas assez connu, est le massacre ou la déportation de la population juive de Salonique qui était alors la grande ville juive de la Méditerranée orientale. Il faut remercier l’auteur de ce rappel. L’intrigue policière est bien structurée, et, comme d’habitude, on ne lâche pas le livre sans le terminer. Qu’est-ce donc qui m’a gêné ? Tout d’abord dans la forme, les « vannes » fréquentes qui on fait comparer Bernie au Marlowe de Chandler, s’apparentent plutôt ici à celles des nombreux polars écrits à la va vite et attribuées au multi-auteur Carter Brown. Ces vannes sont parfois drôles (« C’était un homme aux gouts simples, se contentant de ce qu’il y avait de meilleur »), mais souvent avec une marque de préjugé (« un homme brun, petit mais beau ») ou tout simplement de mauvais goût (« je me gratterais le cul avec une faucille et un marteau »). Sur le style, les commentaires, les opinions avancées on s’apparente à la manière de Gérard de Villiers : moins de sexe et de sang peut-être, mais de longs et insupportables exposés sur les opinions de Bernie ou de ses interlocuteurs sur des sujets souvent oiseux. Bernie rejoint, et partage, hélas, les comportements et les opinions de l’autre personnage de trilogie de Ph. Kerr, l’entraineur de football raciste Scott Manson qui lui aussi se retrouve précisément en Grèce dans le second tome de la trilogie, la main de dieu. On retrouve le mépris des grecs en général, de leurs institutions, et, ici, du premier ministre et ses ministres de l’époque. Plus grave, il flotte sur l’ouvrage comme un parfum de ce qu’on nommerait de nos jours du complotisme. Il s’agit de ce que les tabloïds londoniens développaient à l’époque (et ont continué de développer depuis), à savoir l’idée que l’Allemagne fédérale de Adenauer (explicitement cité dans l’ouvrage) était une usine à recyclage d’ancien membres du régime Nazi grâce à la mise en place de la Communauté Économique Européenne, dont le traité est précisément signé au même moment à Rome en mars 1957. La traduction est facile à lire et donc satisfaisante, sauf le titre. En anglais, le titre, Greeks Bearing Presents fait référence à la locution bien connue (entre autres des lecteurs d’Astérix) : « Timeo Danaos et dona ferentes » Je crains les Grecs même lorsqu’il apportent des cadeaux. Cela n’a rien à voir avec l’ouvrage, sinon qu’il se passe en Grèce, mais c’est une manière d’exprimer des préjugés vis à vis des Grecs. La traduction française n’est donc pas plus appropriée à l’ouvrage. Tout cela est un peu dommage, on a beaucoup aimé le personnage de Ph. Kerr, cynique, mais idéaliste et loyal. Peut-être était-il temps que Bernie et son alter héros, Scott Manson prennent leur retraite.

  BOISSON, JEAN-MARIE - Le 27 décembre 2020 à 16:27

• 4/5

  ROJTMAN, FRANÇOISE - Le 30 novembre 2019 à 17:27